Hostname: page-component-8448b6f56d-m8qmq Total loading time: 0 Render date: 2024-04-24T03:41:52.370Z Has data issue: false hasContentIssue false

Vers une histoire de l’exemption fiscale nobiliaire

La Provence des années 1530 à 1789

Published online by Cambridge University Press:  04 May 2017

Rafe Blaufarb*
Affiliation:
Auburn University

Résumé

Au coeur du système fiscal absolutiste se trouve l’exemption nobiliaire d’impôts, une institution dont l’importance est si généralement reconnue qu’elle en est trop souvent tenue pour acquise. Pourtant, cette exemption a une histoire. C’était une construction juridique contestée, soumise à des fluctuations constantes, ainsi qu’un objet de conflits qui reflétait la relation dynamique entre la couronne, la noblesse et le tiers état. Cet article analyse l’histoire conflictuelle de cette institution en Provence des années 1530 à la Révolution. L’exemple provençal suggère quelques points à réviser parmi les interprétations les plus généralement admises de l’absolutisme. En premier lieu, on y trouve des preuves que la monarchie n’a pas forcément cherché à régner par l’entremise des nobles locaux. Il remet aussi en question l’idée que l’administration absolutiste voulait vaincre la résistance des intermédiaires traditionnels afin de pénétrer plus profondément la France provinciale. Il permet d’envisager que, en semant la discorde entre les élites provinciales, les exigences fiscales royales créèrent – involontairement – une pléthore de disputes internes, qui sapa la cohésion provinciale et poussa les élites régionales divisées à réclamer l’arbitrage de la monarchie.

Abstract

Abstract

At the heart of the absolutist fiscal system lay noble tax exemption, an institution whose importance is so generally accepted that it has largely been taken for granted. Yet, noble tax exemption has a history. It was a contested juridical construction in a constant state of flux and a locus of conflict which encapsulates the dynamic relationship between Crown, nobility, and Third Estate. This article examines the turbulent history of noble tax exemption in Provence from the 1530s to the Revolution. The example of Provence suggests several ways currently accepted interpretations of absolutism might be revised. First, it offers evidence that the monarchy did not necessarily seek to rule through the local nobility. It also challenges the notion that the absolutist government deliberately sought to overcome the resistance of traditional intermediate bodies in order to reach deeper and deeper into provincial France. Rather, it suggests that by fomenting strife among provincial elites, royal fiscal demands unintentionally created a welter of internecine disputes that undermined provincial cohesion and left the divided local elites clamouring for monarchical arbitration.

Type
L’argent De l’impôt au marché
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2005

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

1- Pour un apercu de la fiscalité sous le régime absolutiste, ainsi que pour son excellente bibliographie, voir Félix, Joël, Économie et finances sous l’Ancien Régime : guide du chercheur, 1523-1789, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1994 CrossRefGoogle Scholar. Sur la question de l’imposition, voir Hincker, François, Les Français devant l’impôt sous l’Ancien Régime, Paris, Flammarion, 1971 Google Scholar. Sur le rôle des corps privilégiés dans le système du crédit d’État, voir Bien, David D., « Les offices, les corps, et le crédit d’État : l’utilisation des privilèges sous l’Ancien Régime », Annales ESC, 43-2, 1988, pp. 379404 Google Scholar, et Potter, Mark, « Good offices: Intermediation by corporate bodies in Early Modern French public finances », Journal of economic history, 60, 3, 2000, pp. 599626 CrossRefGoogle Scholar. Sur les finances et la logistique militaires, voir Rowlands, Guy, The dynastic State and the army under Louis XIV: Royal service and private interests, 1661-1701, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.CrossRefGoogle Scholar

2- Tocqueville, Alexis de, L’Ancien Régime et la Révolution, éd. par Jacob Peter Mayer, Paris, Gallimard, 1967, pp. 178181 Google Scholar. La vision de Tocqueville s’inspire des opinions polémiques avancées par l’observateur contemporain Philippe de Commynes. Sur le traitement historique des liens entre l’exemption et le consentement dans la construction du régime fiscal absolutiste, voir Russell Major, J., From renaissance monarchy to absolute monarchy: French kings, nobles, and Estates, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1994, pp. 812.Google Scholar

3- En voici quelques exemples : Ardant, Gabriel, L’histoire de l’impôt, Paris, Fayard, 1971-1972, 2 vol.Google Scholar ; Bonney, Richard, The king's debts: Finance and politics in France, 1589-1661, Oxford, Oxford University Press, 1981 Google Scholar ; Collins, James, Fiscal limits of absolutism: Direct taxation in early seventeenth-century France, Berkeley, University of California Press, 1988 Google Scholar ; Dessert, Daniel, Argent, pouvoir et société au Grand Siècle, Paris, Fayard, 1984.Google Scholar

4- D’excellentes descriptions figurent dans les ouvrages de Bohanan, Donna, Crown and nobility in Early Modern France, New York, Palgrave, 2001, p. 34 CrossRefGoogle Scholar, ou Doyle, William, The Oxford history of the French Revolution, Oxford, Oxford University Press, 1989, p. 4.Google Scholar

5- Beik, William, Absolutism and society in seventeenth-century France: State power and provincial aristocracy in Languedoc, Cambridge, Cambridge University Press, 1985 CrossRefGoogle Scholar. Les autres études languedociennes s’étendent peu sur le sujet : voir les ouvrages de Forster, Robert, The nobility of Toulouse in the eighteenth century: A social and economic study, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1960 Google Scholar, et Frêche, Georges, « Compoix, propriété foncière, fiscalité et démographie historique en pays de taille réelle (XVIe- XVIIIe siècles) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 18, 1971, pp. 321353.CrossRefGoogle Scholar

6- Kwass, Michael, Privilege and the politics of taxation in eighteenth-century France, Cambridge, Cambridge University Press, 2000 Google Scholar ; Esmonin, Edmond, La taille en Normandie au temps de Colbert, Paris, Hachette, 1913 Google Scholar, fournit davantage d’informations sur l’exemption en province.

7- Swann, Julian, Provincial power and absolute monarchy: The Estates general of Burgundy, 1661-1790, Cambridge, Cambridge University Press, 2003 CrossRefGoogle Scholar. Même s’il porte une attention particulière à ce qu’il appelle « les enveloppes juridiques » de tenure, seigneurie, et fiscalité royale, Pierre de Saint-Jacob les présente de façon figée, sans en faire l’histoire ( Saint-Jacob, Pierre de, Les paysans de la Bourgogne du Nord au dernier siècle de l’Ancien Régime, Paris, Les Belles Lettres, 1960, p. 22 Google Scholar).

8- En conséquence, la dispute politique concernant l’impôt ne tournait pas autour de distinctions d’ordre (taille réelle vs taille personnelle), mais autour d’intérêts économiques et de la relation du système d’imposition avec la terre. « Parce que les impôts directs en Bretagne étaient à la fois réels (basés sur le statut de la terre) et personnels (basés sur le statut de l’individu), le duc [de Bretagne] vendait des exemptions des deux natures » ( Collins, James, Classes, Estates, and order in Early Modern Brittany, Cambridge, Cambridge University Press, 1994, pp. 10 et 121CrossRefGoogle Scholar). Bien que ces lignes suggèrent que les définitions légales et les manifestations institutionnelles de l’exemption d’impôts aient dessiné les contours du conflit politique en Bretagne à l’époque moderne, et que les différences régionales exprimées par ces conflits puissent être expliquées par celles entre les provinces, et leur façon de régir l’exemption, rien d’autre n’est ajouté à ce sujet dans le livre. La coexistence de la réalité et de la personnalité est aussi brièvement évoquée par Jean Meyer, mais il n’offre pas plus d’explications que James Collins ( Meyer, Jean, La noblesse bretonne au XVIIIe siècle, Paris, Sevpen, 1966, 2 vol.Google Scholar).

9- Hickey, Daniel, The coming of French absolutism: The struggle for tax reform in the Province of Dauphiné, 1540-1640, Toronto, University of Toronto Press, 1986.Google Scholar

10- Avec son cadre légal et administratif différent, voire exclusif, la Provence ne doit pas être considérée comme un exemple strictement représentatif de la France entière. Néanmoins, c’est précisément à cause de la singularité de sa « constitution » que la question de l’exemption fiscale nobiliaire qui soulevait tant de débats ressort avec autant de clarté. Sur le cadre légal et institutionnel de l’Ancien Régime, voir Baehrel, René, Une croissance : la Basse-Provence rurale de la fin du XVIe siècle à 1789, Paris, Sevpen, 1961 Google Scholar ; François-Paul Blanc, L’anoblissement par lettres en Provence à l’époque des réformations de Louis XIV, 1630-1730, Thèse de Droit, Aix-en-Provence, 1971 ; Bry, M. J., Les vigueries de Provence, aperçu de leur histoire jusqu’à la fin du XVIe siècle, Paris, Librairie Alphonse Picard & Fils, 1910 Google Scholar; Derlange, Michel, Les communautés d’habitants en Provence au dernier siècle de l’Ancien Régime, Toulouse, Publications de l’Université Toulouse-Le Mirail, 1987 Google Scholar ; François-xavier Emmanuelli, Pouvoir royal et vie régionale en Provence au déclin de la monarchie : psychologie, pratiques administratives, défrancisation de l’intendance d’Aix, 1745-1790, Thèse de Doctorat d’État, Aix-en- Provence, 1971, 2 vol. ; Hildesheimer, Bernard, Les assemblées générales des communautés de Provence, Paris, Éditions A. Pedone, 1935 Google Scholar; Jean-Louismestre, , Un droit administratif à la fin de l’Ancien Régime : le contentieux des communautés de Provence, Paris, Librairie générale de droit et de jurisprudence, 1976 Google Scholar ; Pillorget, René, Les mouvements insurrectionnels de Provence entre 1596 et 1715, Paris, Éditions A. Pedone, 1975.Google Scholar

11- Aix-en-Provence, Bibliothèque Méjanes [BM], ms. 729 (825), « Ordonnance des commissaires du réaffouagement général de toutes les villes et lieux de la province, portant entre autres que les seigneurs de fief avec juridiction payeroient la taille des biens roturiers qu’ils acquereront, quoique dans l’étendue de leur fief, si ce n’est que tels biens leur fussent obtenus par leur droit de fief, conformément à l’ordonnance du roi René de 1448 » (1471).

12- Aix-en-Provence, BM, ms. 723 (610), « Administration du pays de Provence » (vers 1780), vol. 3, « Compensation des biens nobles avec les biens roturiers ».

13- Papon, Jean, Nouvelle et cinquième édition du recueil d’arrests notables de cours souveraines de France, Lyon, 1569, p. 391.Google Scholar

14- Jusqu’en 1789, « l’esprit procédurier » des communautés de Provence inquiéta les ministres. Les seigneurs dénoncèrent la « maladie populaire » de leurs vassaux, c’est-àdire leur empressement à les mener en justice. Voir Archives nationales [AN], H11279, 8 avril 1780, « Contrôleur-général Necker aux procureurs du pays de Provence » ; et Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Avertissement pour la noblesse de Provence contre les communautés dudit pays, sur le sujet des compensations établies par l’arrêt du conseil du 15 décembre 1556 et confirmées par celuy du 15 juin 1668 » (vers 1685).

15- Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), 20 juin 1541 : « Lettres royaux contenants comment tous les seigneurs de villes, châteaux, et autres nobles seront tenus payer tailles et autres charges des biens qu’ils ont acquis et aquereront, lesquels biens étant taillables avant qu’ils les eussent aquis ». Pour un traitement complet de l’évolution fiscale sous le règne de François Ier, voir Hamon, Philippe, L’argent du roi. Les finances sous François Ier , Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1994.CrossRefGoogle Scholar

16- Aix-en-Provence, BM, ms. 723 (610), « Administration du pays de Provence » (vers 1780), vol. 3, « Compensation des biens nobles avec les biens roturiers ».

17- Sur le parlement et sa composition sociale, voir Bohanan, Donna, Old and new nobility in Aix-en-Provence, 1600-1695: Portait of an urban elite, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 1992 Google Scholar; Cubells, Monique, La Provence des Lumières. Les parlementaires d’Aix au XVIIIe siècle, Paris, Maloine, 1984 Google Scholar ; et Kettering, Sharon, Judicial politics and urban revolt in seventeenth century France: The parlement of Aix, 1629-1659, Princeton, Princeton University Press, 1978.Google Scholar

18- Pour un panorama succinct de ces événements, voir l’essai de Gabriel Audisio en introduction à l’ouvrage de Jacques Aubéry, Histoire de l’exécution de Cabrières et de Mérindol et d’autres lieux de Provence, particulièrement déduite dans le plaidoyé qu’en fit l’an 1551 par le commandant du Roy Henri II et comme son advocat général en cette cause, Jacques Aubéry, Paris, S. et G. Cramoisy, 1645, éd. par Gabriel Audisio, Mérindol, Edisud, 1982, pp. V-XIII. Sur la virulence du parlement de Provence, voir William Monter, E., Judging the French Reformation: Heresy trials by sixteenth-century parlements, Cambridge, Harvard University Press, 1999.Google Scholar

19- Aubéry, J., Histoire de l’exécution…, op. cit., p. 223 Google Scholar.

20- Papon, J., Nouvelle et cinquième édition …, op. cit., p. 329 Google Scholar.

21- Aix-en-Provence, BM, ms. 726 (822), « Précis des registres de la noblesse de Provence, dont le premier commence en l’année 1549 et finit en 1624, et le second suit en l’année 1625 jusqu’à la présente année 1731 » (vers 1760).

22- Les communautés en général réduisaient la noblesse à rien de plus que le « corps de messieurs les possédants-fiefs ». La noblesse répondait sur le même ton, affublant les communautés de dénominations peu flatteuses, les nommant « administrateurs des biens taillables ». Ce jeu provençal sur les noms illustre l’observation de J. Collins, qui écrit que les classes dans la France de l’époque moderne employaient fréquemment la rhétorique de l’ordre pour défendre leurs intérêts ( Collins, J., Classes, Estates, and orders…, op. cit., pp. 1112 Google Scholar). Pour les citations, se référer aux archives départementales des Bouches-du-Rhône [AD-BdR], C 110, 6 novembre 1769, « Registre des délibérations de la noblesse de Provence depuis le 16 avril 1752 jusques et inclus le 6 novembre 1781 » ; id., 4 juillet 1759, « Assemblée particulière » ; AD-BdR, C 949, « Mémoire et consulation pour la noblesse ».

23- Au sujet du syndic du tiers, des demandes pour sa restauration et des divisions subséquentes en 1787-1788, voir AN, H11240, « Observations sur le syndic des communautés ou du tiers état » (1788).

24- La loi, en particulier la loi fiscale, n’était pas simplement le reflet des intérêts matériels des groupes dominants. Elle était aussi constitutive de ces groupes. Pour reprendre l’exemple ci-dessus, le corps de la noblesse acquit un profil social distinct basé sur l’évolution du cadre juridique des impôts et de l’exemption fiscale, en particulier en excluant de ses rangs tous les membres du second état qui ne possédaient pas de fiefs. Sur les relations entre la classification fiscale et la construction de catégories sociales, voir Guery, Alain, « État, classification sociale et compromis sous Louis XIV : la capitation de 1695 », Annales ESC, 41-5, 1986, pp. 10411060 Google Scholar. Pour une autre discussion pertinente sur les interactions complexes entre la loi, les institutions, l’économie et la culture dans la formation des identités sociales, voir Cerutti, Simona, La ville et les métiers. Naissance d’un langage corporatif (Turin, 17e-18e siècles), Paris, Éditions de l’EHESS, 1990 Google Scholar, et Cosandey, Fanny (éd.), Dire et vivre. L’ordre social en France sous l’Ancien Régime, Paris, Éditions de l’EHESS, 2005.Google Scholar

25- La description du procès qui suit s’appuie sur Papon, J., Nouvelle et cinquième édition…, op. cit., pp. 329392.Google Scholar

26- La noblesse, cependant, ne revendiqua pas qu’une terre, une fois anoblie, conserve son caractère nobiliaire et l’exemption dont elle jouissait, dans le cas où elle passerait dans d’autres mains par la suite. Ceci aurait permis aux roturiers, qui n’étaient redevables d’aucun service personnel vis-à-vis du souverain, de bénéficier de l’exemption sans devoir remplir les obligations habituelles, c’est-à-dire dispenser la justice et fournir un service militaire. La noblesse chercha à anticiper le développement de cette situation paradoxale, non seulement à cause du coup terrible que cela aurait asséné à son statut et à sa fierté, mais aussi parce que cela représentait une grave menace pour la logique féodale du service dont toutes les exemptions nobiliaires dérivaient.

27- Papon, J., Nouvelle et cinquième édition…, op. cit., pp. 343344.Google Scholar

28- Parce qu’il offrait la possibilité de maintenir la base fiscale intacte, l’idée d’étendre le système de la réalité des tailles à tout le royaume fut périodiquement envisagée par quelques réformateurs fiscaux au cours des XVIIe et XVIIIe siècles. D’autres rejetèrent cette idée au profit d’un système plus efficace de personnalité, qui, en estimant plus précisément les richesses des individus imposables, pût augmenter les revenus royaux sans les bouleversements que l’extension de la réalité risquerait d’entraîner. Sur le débat entre les partisans de ces approches contrastées de la réforme, voir Félix, Joël, Finances et politique au siècle des Lumières. Le ministère L’Averdy, 1763-1768, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1999 CrossRefGoogle Scholar, et Touzery, Mireille, L’invention de l’impôt sur le revenu. La taille tarifiée, 1715-1789, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1994.CrossRefGoogle Scholar

29- Ibid., p. 355. Bien qu’incomplètement satisfaisante, la prise de position de Marillac a le mérite de souligner que la personnalité fut un élément de confusion injecté dans la taille réelle provençale par sa logique seigneuriale d’exemption. En réalité, le système fiscal provençal était encore plus compliqué que cela. Il y avait un troisième type de taille, un impôt local connu sous le nom de taille négociable (une imposition interne prélevée par les communautés pour financer les développements locaux), qui était aussi source de procès entre les seigneurs et leurs communautés (Ibid., pp. 371-372).

30- Ibid., pp. 359-360. Ces circonstances concernaient le cas d’un seigneur involontairement entré en possession de terres qu’il avait auparavant aliénées à des vassaux, lesquels auraient ensuite dérogé à leurs obligations. Comme il était considéré comme injuste de forcer le seigneur à assumer les dettes du fautif, toutes les hypothèques dont la propriété avait pu faire l’objet lorsqu’elle était occupée par le vassal étaient annulées. Puisque l’obligation d’une parcelle de terre pour contribuer à la taille était vue comme l’équivalent légal d’une dette attachée à la propriété, les seigneurs étaient ainsi délivrés du fardeau qui aurait pu être le leur s’ils avaient été imposés sur des terres involontairement retombées dans leur giron.

31- Ibid., p. 385.

32- Ibid., p. 387.

33- Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Arrest du parlement de Paris du 5 septembre 1552, entre le clergé, la noblesse, les officiers, et le tiers état de Provence, touchant la compensation des biens nobles » ; « Arrest du conseil privé, donné entre le syndic du commun peuple et Tiers Estat du pays de Provence et le syndic delegué par les nobles, vassaux, et sujets de Sa Majesté audit pays, le 15 décembre 1556 ».

34- A. De Tocqueville, L’Ancien Régime…, op. cit., « Des pays d’états et en particulier du Languedoc », pp. 325-328. Dans son important ouvrage sur le Languedoc, les propos de Georges Frêche résonnent de l’évaluation enthousiaste de Tocqueville. Il mentionne au passage, cependant, une « lutte contre les terres nobles » livrée par les communautés languedociennes pendant les XVIIe et XVIIIe siècles, mais n’y consacre qu’une page ( Frêche, Georges, Toulouse et la région Midi-Pyrénées au siècle des Lumières (vers 1670- 1789), Paris, Cujas, 1976, pp. 405406 Google Scholar). Le livre plus récent de W. Beik, Absolutism and society…, op. cit., sur le Languedoc, n’en parle pas.

35- Ainsi, en Provence, le débat célèbre autour de la sentence « Fief et justice n’ont rien en commun » faisait l’objet d’implications financières très concrètes.

36- Aix-en-Provence, BM, ms. 732 (828), « Recueil des délibérations des états depuis l’année 1523 jusques en 1554 » (janvier 1553) ; id., « Assemblée des quelques gentilshommes et communautés à Aix » (janvier 1553).

37- AD-BdR, C 76, 78 et 80, « Registres des délibérations de la province » (1744-1762).

38- Ces obligations financières semblent trop complexes, variées et nombreuses pour qu’il en soit discuté de manière plus approfondie ici. Qu’il suffise de dire que, même avant la création de nouveaux impôts directs dont les terres nobles n’étaient pas exemptées, le corps de la noblesse dut entrer dans diverses affaires extraordinaires pour protéger l’intégrité de ses fiefs. En utilisant quelques-unes des techniques employées pour soustraire de l’argent au corps des officiers, à savoir la création d’offices de justice seigneuriale, de nouveaux droits levés lors du transfert de propriétés féodales et des recherches de fief similaires aux recherches de noblesse, le gouvernement royal parvint à retirer des fonds considérables du système de propriété féodale. Cette utilité financière en explique pour partie la vigueur ininterrompue.

39- J’ai choisi délibérément d’exagérer ici l’homogénéité des deux groupes pour souligner mon argumentaire sur la conflictivité inhérente à la structure du régime de la taille réelle en Provence. En réalité, la plupart des seigneurs gentilshommes possédaient des terres roturières sur lesquelles ils payaient des impôts. En effet, quelques-uns possédaient davantage de terres roturières que de terres nobles ; dans ce cas précis, les communautés auraient mieux servi les intérêts financiers des seigneurs que ne l’aurait fait le corps de la noblesse. Quant aux seigneurs roturiers, il est très peu probable qu’ils eussent choisi de s’identifier au corps de la noblesse parce que ce dernier leur déniait le droit de faire entendre leur voix dans les affaires collectives du corps, tout en imposant les terres nobles en leur possession.

40- Ces exemples sont tirés d’un rapport soumis au conseil royal par l’intendant Cardin Lebret, vers 1700 (Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Extrait du verbal de contestation dressé par le sieur Le Bret sur l’article du droit de compensation, entre les syndics de la noblesse et le tiers état, avec la réponse des syndics de la noblesse »).

41- C’est ce que craignait Marillac dans le cas d’exceptions faites au droit de fief d’un seigneur. Pour plus d’informations sur cette procédure judiciaire peu connue qu’est le déguerpissement, voir Loyseau, Charles, Les oeuvres de Maistre Charles Loyseau, avocat en Parlement, contenant les cinq livres du droit des offices, les traitez des seigneuries, des ordres et simples dignitez, du déguerpissement et délaissement par hypothèque, de la garantie des rentes, et des abus des justices de village, Lyon, Compagnie des Libraires, 1701.Google Scholar

42- Aix-en-Provence, BM, ms. F 733, « Mémoire sur le projet de rétablir les anciens états de Provence » (juillet 1787).

43- La noblesse avait déjà lancé cette accusation en 1549, au cours du procès initial devant le parlement de Paris : Papon, J., Nouvelle et cinquième édition…, op. cit., p. 373.Google Scholar

44- Puisque les élites municipales qui contrôlaient à présent l’administration provinciale bénéficiaient de la répartition existante, elles avaient peu d’intérêt à réclamer la révision de l’ancien affouagement de 1471, encore en vigueur en 1661, quand Louis XIV commença son règne personnel. Le roi était convaincu qu’un nouvel affouagement lui permettrait d’extraire plus de revenus de la province. Les plaintes de quelques villes moins favorisées sur les inégalités de la distribution de la charge fiscale lui fournirent un prétexte pour insister sur ce point. En menaçant de transformer la Provence en pays d’élection, d’envoyer des troupes dans la province, d’y imposer une nouvelle gabelle par la force et de poursuivre l’affouagement avec ses propres officiers, le gouvernement royal obligea finalement l’assemblée générale à accepter d’entreprendre un nouvel affouagement. Sur les négociations tendues entre la Couronne et la province, voir les délibérations de l’assemblée générale des communautés 1660-1665 : AD-BdR, C 39, « Registre des délibérations de la province » (juillet 1658-octobre 1661), et C 41, « Registre des délibérations de la province » (3 novembre 1661-décembre 1665).

45- AD-BdR, C 2071, « Cahier des remontrances » (1666), article 2.

46- « Déclaration du roi sur la fixation des biens nobles et roturiers, sur l’établissement des dixains ou douzains des fruits, droits de bouvage, fournage et autres; et sur l’affranchissement des biens roturiers du payement des tailles » (Saint-Germain, février 1666). La distinction entre terre noble et non noble dans le Languedoc ne reçut une définition judiciaire claire que deux décennies plus tard, avec la promulgation de la déclaration du roi du 9 octobre 1684, portant règlement sur la nobilité des fonds et héritages en la province de Languedoc.

47- AD-BdR, C 108, « Registre second des délibérations de la noblesse commencée le 17 décembre 1625 et fini en 1718 » ; « Conférence tenue à Aix dans la maison de maitre Scipion du Perrier, advocat de la Cour, l’un des sieurs sindics de la noblesse » (22 octobre 1666) ; « Conférence tenue dans la maison de M. du Perrier, syndic de la noblesse, touchant les trois procès que le corps de ladite noblesse a contre les lieutenants, procureurs du pays, et le clergé, portant imposition d’une cote pour subvenir à la poursuite d’iceux » (26 mars 1667).

48- Ibid., « Assemblée générale de la noblesse », 26 janvier 1668 ; et Aix-en-Provence, BM, ms. 815 (838), « Mémoires dressés par MM. de la noblesse ensuite des déclarations du roi contre eux » (1668).

49- « Arrest du Conseil qui maintient la Noblesse du Pays de Provence aux droits de compensation et aux exemptions des forains » (15 juin 1668). L’arrêt fut rendu sur le rapport de Colbert. AN, H11240, « Rapport pour le Roi fait en 1783 par M. Fortin touchant le Droit de Compensation en Provence et sur lequel est intervenu la Déclaration du 24 Mai 1783 ».

50- AD-BdR, C 2072, « Cahier des remontrances » (1675).

51- Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Extrait des Registres du conseil d’Estat » (27 janvier 1680).

52- AN, G7464, Aix, « Lebret au contrôleur-général Pontchartrain » (5 mars 1698). Encore une fois, la noblesse insista sur le fait que les critiques des communautés n’étaient rien d’autre qu’un stratagème pour détourner l’attention des inégalités de la nouvelle répartition : Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825) « Requête au Roi, du Syndic de la Noblesse, sur la Compensation et Qualité de Forain » (v. 1698-1701).

53- AN, G7464, « Lebret au contrôleur-général Pontchartrain » (4 décembre 1698).

54- Les chiffres, ainsi que la citation, proviennent d’Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), mémoire (non relié et sans titre) de la noblesse à la fin de ce registre.

55- Pour le récit de ces négociations, voir Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Mémoire de ce qui s’est passé dans l’affaire qui est entre MM. de la noblesse et les sieurs procureurs du pays de Provence sur le fait de la compensation des biens nobles avec les roturiers, sur le droit de forain, etc., avec trois projets de règlement par la noblesse, par le tiers état, par les ministres » (1700) ; et AD-BdR, 1 G 489, « Briève relation de ce qui s’est passé dans le traitté d’accomodement de l’affaire de la province contre Mrs les sindics de la noblesse » (vers 1700). Voir aussi la correspondance entre Lebret et le comte de Grignan dans AN, G7464.

56- La plupart des plaidoiries soumises au conseil royal par les deux parties se trouvent dans Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825). Un sommaire concis des arguments respectifs est fourni par l’abbé de Coriolis dans son Traité sur l’administration du comté de Provence, Aix, 1786-1788, vol. 3, pp. 326-337.

57- AD-BdR, C 108, « Registre second des délibérations de la noblesse commencée le 17 décembre 1625 et fini en 1718 », « Conférence » (25 février 1702).

58- D’après les plaintes de la noblesse, la province utilisait son autorité au nom de la collectivité pour harceler les seigneurs et les appauvrir. Seule une étude approfondie des procès ayant un rapport avec les impôts pourrait nous permettre de vérifier la validité de la plainte. Néanmoins, il semble bien que la province ait été déterminée à coordonner les efforts auparavant non centralisés des communautés pour s’opposer à l’usurpation seigneuriale et empêcher les conseils municipaux soumis d’ignorer de tels abus dans leur propre voisinage. Sur les accusations de harcèlement de la noblesse, voir AD-BdR, C 110, « Registre des délibérations depuis le 16 avril 1752 jusques et inclus le 6 novembre 1781 », et « Assemblée particulière » (9 janvier 1761). Sur la détermination de la province à coordonner les actions judiciaires anti-seigneuriales de toutes les communautés, voir AD-BdR, C 78, « Registre des délibérations de la province, 1752- 1758 », et « Assemblée particulière » (5 août 1755).

59- Dans ce paragraphe, toutes les citations sont tirées de « Moyens des Sindics de la Noblesse sur le droit de compensation » dans l’« Arrest du Conseil d’État du Roy, du septième Février 1702, servant de règlement, entre le Corps de la Noblesse et celuy du Tiers état de Provence au sujet des Tailles », Aix, 1702, pp. 16-28.

60- Cette prise de conscience ne fut pas immédiate. La province réagit initialement à la décision de 1702 en émettant des remontrances véhémentes et en lançant de nouveaux appels pour la déclaration de 1666. Sur ces protestations initiales, voir AD-BdR, 1 G 489, « Remontrances des procureurs des gens des trois états de Provence contre les seigneurs féodataires de la dite province », et « Très humble remontrance faite au Roy pour les procureurs des gens des trois états de Provence contre les seigneurs de fiefs du mesme pais, au sujet de l’arrest rendu au Conseil d’Estat au mois de février 1702, non encore signiffié ».

61- Julien, Jean-Joseph, Nouveau commentaire sur les statuts de Provence, Aix, 1778, vol. 2, p. 155 Google Scholar. Cette idée se trouve aussi chez Touloubre, Louis Ventre de la, Collection de jurisprudence sur les matières féodales et les droits seigneuriaux, utile aux différentes cours et juridictions du royaume, et en usage principalement en Provence et en Languedoc, Avignon, 1773, p. 116 Google Scholar : « Nul autre que le seigneur justicier ne peut posseder des biens nobles en Provence. Alienés sans une portion de la juridiction, ils tombent en roture. » Le principe fut avancé dès le milieu du XVIIe siècle par Morgues, Jacques, Les statuts et coustumes du pays de Provence, Aix, 1658, p. 359 Google Scholar. Pour une analyse approfondie de la question, voir Aix-en-Provence, BM, ms. 729 (825), « Dissertation sur la question de savoir si un fonds affranchi de tailles et réuni au fief par voye de compensation, venant à être aliéné par le seigneur, sans juridiction, et rentrant dans le cadastre, dont il avoit été tiré, peut être donné en compensation ».

62- Sur le marché de la propriété seigneuriale en Provence, voir Cubells, Monique, « La propriété féodale en Basse-Provence dans la dernière moitié du XVIIIe siècle : nobles et bourgeoisie », in ID., La noblesse provençale du milieu du XVIIe siècle à la Révolution, Aixen-Provence, Publications de l’Université de Provence, 2002, pp. 171203 Google Scholar. Au sujet du marché foncier en général dans la France de l’Ancien Régime, voir Béaur, Gérard, Le marché foncier à la veille de la Révolution. Les mouvements de propriété beaucerons dans les régions de Maintenon et de Janville de 1761 à 1790, Paris, Éditions de l’EHESS, 1984 Google Scholar ; Grenier, Jean-Yves, L’économie d’Ancien Régime. Un monde de l’échange et de l’incertitude, Paris, Albin Michel, 1996 Google Scholar ; Hoffman, Philip T., Growth in a traditional society: The French countryside, 1450-1815, Princeton, Princeton University Press, 1996 Google Scholar ; Moriceau, Jean-Marc et Postel-Vinay, Gilles, Ferme, entreprise, famille, grande exploitation et changements agricoles, XVIIe-XIXe siècles, Paris, Éditions de l’EHESS, 1992 Google Scholar ; Postel-Vinay, Gilles, La terre et l’argent. L’agriculture et le crédit en France du XVIIIe siècle au début du XXe siècle, Paris, Albin Michel, 1998.Google Scholar

63- La nouvelle détermination du gouvernement royal (démontrée par les tentatives, au milieu du XVIIIe siècle, visant à introduire une nouvelle imposition, le vingtième) pour extraire toujours plus de fonds du royaume incita les administrateurs de la province à élaborer cette réinterprétation du droit de la compensation. On ne saurait trop insister sur le fait que plus les exigences de la monarchie augmentaient, plus la question de l’exemption fiscale nobiliaire devenait aiguë. Sur le climat fiscal tendu de la seconde moitié du XVIIIe siècle, voir M. Kwass, Privilege and the politics of taxation…, op. cit.

64- AD-BdR, C 110, « Registre des délibérations depuis le 16 avril 1752 jusques et inclus le 6 novembre 1781 », et « Assemblée générale » (15 mai 1769).

65- Ibid., « Assemblée particulière » (30 juillet 1780).

66- Pour des rapports de première main sur ces négociations infructueuses, voir AD-BdR, C 953, Alpheran, « Mémoire sur le droit de compensation dont jouit la noblesse » (14 avril 1781) ; Aix-en-Provence, BM, ms. 723 (610), « Administration du Pays de Provence » (vers 1780), vol. 3, « Compensation des biens nobles avec les biens roturiers » (1780) ; Aix-en-Provence, BM, ms. 783 (541), « Portalis, assesseur d’Aix à Msgr l’archevêque d’Aix, sur le droit de compensation » (1780).

67- Aix-en-Provence, BM, ms. 783 (541), « Portalis, assesseur d’Aix à Msgr l’archevêque d’Aix, sur le droit de compensation » (1780).

68- AD-BdR, C 953, Alpheran, « Mémoire sur le droit de compensation dont jouit la noblesse » (14 avril 1781).

69- On peut établir un parallèle avec l’élimination progressive des privilèges dont jouissaient les bourgeois de Paris. À ce sujet, voir Croq, Laurence, « Privilèges fiscaux et hiérarchie sociale : le déclassement des “bourgeois de Paris” du milieu du XVIIe siècle à la Révolution », Études et documents, XI, 1999, pp. 5395.Google Scholar

70- Pour un exposé sur l’histoire de cette pratique en Provence, voir Emmanuelli, François-Xavier, « Introduction à l’histoire du XVIIIe siècle communal en Provence », Annales du Midi, 87, 122, 1975, pp. 157200.CrossRefGoogle Scholar

71- « Déclaration du roi, portant que l’action en rachat ou en encadastrement des biens aliénés par les communautés avec franchise de taille, en département de dettes, est indépendante de toute prescription ou déchéance, et qui détermine les preuves et les justifications que les Seigneurs des lieux doivent rapporter pour être maintenus dans la franchise des tailles desdits biens » (Versailles, 24 mai 1783). L’un des principaux objectifs « prérévolutionnaires » de la noblesse en 1787-1788 était d’obtenir une révocation de cette loi qu’ils jugeaient fatale à leur devenir. Sur ces efforts, voir AD-BdR, C 4061, « Au Roy ».

72- AD-BdR, C 1371, « Mémoire sur la constitution actuelle du pays de Provence » (18 juin 1787). Il faudrait se demander si dans les provinces où le tiers état (ou des éléments de celui-ci) bénéficiait d’un monopole du pouvoir politique, une telle rhétorique d’exclusion – « pas de représentation sans imposition » – fut ainsi mobilisée pour défendre le statu quo.

73- Bien que la composition variât à chaque tenue, les états avaient toujours été composés d’un petit groupe d’ecclésiastiques importants, de représentants des communautés privilégiées et des vigueries, et, théoriquement, de tous les gentilshommes fieffés de la province. Quand les états se réunirent le 31 décembre 1787, ils étaient composés de 19 ecclésiastiques, 128 seigneurs et 58 représentants du tiers état. Puisque chacun avait une voix, le contrôle des seigneurs était assuré ( Cubells, Monique, Les horizons de la liberté. Naissance de la Révolution en Provence (1787-1789), Aix-en-Provence, Edisud, 1987, p. 11 Google Scholar).

74- Blaufarb, Rafe, « Conflits autour de la représentation en Provence à la veille de la Révolution », in Combattre, gouverner, écrire. Études réunies en l’honneur de Jean Chagniot, Paris, Economica, 2003, pp. 121131.Google Scholar

75- L’expression la plus engagée d’une telle interprétation se lit dans le travail de W. Beik, Absolutism and society…, op. cit. Bien qu’elle n’entre pas directement dans ce débat éminemment anglo-américain, Legay, Marie-Laure, Les états provinciaux dans la construction de l’État moderne aux XVIIe et XVIIIe siècles, Genève, Droz, 2001 Google Scholar, met aussi l’accent sur la coopération entre l’État et les élites provinciales pendant le XVIIIe siècle en Artois. Pour un essai qui tente d’envisager le débat sous un nouvel angle, en incluant la théorie ainsi que la pratique de l’absolutisme, voir Cosandey, Fanny et Descimon, Robert, L’absolutisme en France. Histoire et historiographie, Paris, Le Seuil, 2002.Google Scholar

76- Root, Hilton, Peasants and king in Burgundy: Agrarian foundations of French absolutism, Berkeley, University of California Press, 1987 Google Scholar, constitue une exception importante. Il insiste sur le fait que le gouvernement royal coopéra avec des communautés rurales afin de réduire le pouvoir seigneurial, ce qui correspond très exactement aux motifs que nous avons ébauchés ici.

77- De son étude des conflits fiscaux dans le Dauphiné, Daniel Hickey tire la même conclusion : « La question de la taille engendra les conflits sociaux qui ouvrirent la porte à l’intervention royale » ( Hickey, D., The coming of French absolutism…, op. cit., p. 188 Google Scholar).

78- Kettering, Sharon, Patrons, brokers, and clients in seventeenth-century France, Oxford, Oxford University Press, 1986, p. 232 Google Scholar. Pour une critique perspicace de cette conception, qu’il appelle le modèle de « rébellion/obéissance », voir Schaub, Jean-Frédéric, « La crise hispanique de 1640. Le modèle des “révolutions périphériques” en question », Annales HSS, 49-1, 1994, pp. 219239.CrossRefGoogle Scholar

79- En même temps, comme cela a été démontré par D. D. Bien, « Les offices, les corps et le crédit d’État… », art. cit., et M. Potter, « Good offices… », art. cit., les exigences fiscales de la monarchie renforcèrent également l’existence des groupes et des institutions grâce auxquelles l’État cherchait à augmenter ses revenus. Si nous avons privilégié ici la tendance de l’imposition royale à semer la discorde, la Provence nous révèle aussi plusieurs cas où la fiscalité royale fut un puissant facteur de cohésion collective.

80- AN, H11242. Au début des années 1760, le corps de la noblesse réussit aussi à forcer plusieurs personnages de haut rang, comme le prince de Condé et le duc de Villeroy, à se soumettre au paiement du vingtième pour les terres nobles qu’ils possédaient en Provence.