Hostname: page-component-8448b6f56d-c47g7 Total loading time: 0 Render date: 2024-04-19T22:57:07.665Z Has data issue: false hasContentIssue false

La nature, sujet de droit ?

Published online by Cambridge University Press:  20 January 2017

Marie-Angèle Hermitte*
Affiliation:
CNRS/EHESS, CENJ-Yan Thomas

Résumé

La diversité biologique et ses composants, ce que l’on appelle souvent la nature, restent aujourd’hui des objets de droit, assortis de régimes juridiques très divers. Pourtant, de nombreuses lois et décisions de justice les dotent de qualités ou de régimes qui sont généralement réservés aux sujets de droit, introduisant un doute – et l’on peut parler, a minima, de situations hybrides. Cet article passe en revue toutes les situations limites : chez l’animal sa souffrance, son monde mental, pour les végétaux et les animaux les territoires qu’on leur concède. Que dire de l’introduction du préjudice écologique dit pur ? Pourtant, seule la Constitution équatorienne déclare expressément la nature, Pacha Mama, sujet de droit.

Abstract

Abstract

Biological diversity and its components –which we often call Nature– remain today legal objects, characterized by very diverse legal regimes. However many laws and court decisions endow them with qualities, or regimes, generally reserved to legal subjects, thus creating a doubt as their status. This article surveys these “legal hybrid situations”, considering for instance personal suffering or the mental world of animals, or territory-sharing between humans and both plants and animals, or what has been called “purely environmental” damage. Yet only the Constitution of Ecuador expressly declares nature, or Pacha Mama, as a subject before the law.

Type
Catégories de la nature
Copyright
Copyright © Les Éditions de l’EHESS 2011

Access options

Get access to the full version of this content by using one of the access options below. (Log in options will check for institutional or personal access. Content may require purchase if you do not have access.)

References

1- Je ne discuterai pas ici la manière dont le droit traite le concept de nature car c’est un immense sujet de recherche, en soi. J’utiliserai le mot dans son acception banale, y mettant l’ensemble de l’environnement et les éléments qui le composent en m’attachant presque exclusivement au moment vivant ; voir, toutefois, Zabalza, Alexandre, La terre, le droit. Du droit civil à la philosophie du droit, Pompignac, Éd. Bière, 2007.Google Scholar

2- Christopher Stone, « Should trees have standing? Towards legal rights for natural objects », Southern California Law Review, 45-2, 1972, p. 148-157 ; on peut citer aussi Tom Regan ou Peter Singer. Plus récemment, un groupe de recherche a repris la problématique : Lynda WARREN (dir.), Wild law: Is there any evidence of earth jurisprudence in existing law and practice? An international research project, Londres, UK Environmental Law Association/the Gaia Foundation, 2009, à la suite des travaux de Cormac CULLINAN, Wild law: Protecting biological and cultural diversity, Foxhole, Green Books, 2003.

3- Francis Caballero, Essai sur la notion juridique de nuisance, Paris, LGDJ, 1981 ; la même année paraît un article de Caroline DAIGUEPERSE, « L’animal, sujet de droit, une réalité de demain », Gazette du Palais, 1, 1981, doctrine p. 60. F. Caballero revient un peu plus tard sur le comportement des juges dans un article célèbre, «Le Conseil d’état, ennemi de l’environnement ? », Revue juridique de l’environnement, 1, 1984, p. 3, avant que la même revue ne tente en 1995 un numéro spécial Le juge administratif, juge vert ? qui montre quelques progrès, encore peu convaincants.

4- En France, il ne sera consacré qu’en 2005 par la Charte de l’environnement dont l’article premier énonce : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé. »

5- Le livre de Burgat, Florence, Animal, mon prochain, Paris, Odile Jacob, 1997,Google Scholar est à cet égard stimulant. En effet, assurant la déconstruction du discours sur le propre de l’homme, il facilite l’émotion liée à la proximité. On notera que l’émotion est centrale dans le concept « Earth Law », note 2.

6- Demogue, René, « Le sujet de droit », Revue trimestrielle de droit civil, 1909, p. 611;Google Scholar Id., Les notions fondamentales du droit privé. Essai critique pour servir d’introduction à l’étude des obligations, Paris, éd. La mémoire du droit, [1911] 2000.Google Scholar

7- Ce sont ensuite des disciplines particulières qui vont aborder les spécificités des syndicats ou des associations.

8- Ou ses synonymes que sont la personne juridique ou la personnalité juridique. Sur le sujet de droit, voir le numéro qui lui est consacré dans Archives de philosophie du droit, 34, 1989.Google Scholar C’est surtout en droit international que les auteurs posent la question du sujet de droit, voir Francis-Amakoué Satchivi, Acakpo, Les sujets de droit. Contribution à l’étude de la reconnaissance de l’individu comme sujet direct du droit international, Paris, L’Harmattan, 1999;Google Scholar Vaurs-Chaumette, Anne-Laure, Les sujets du droit international pénal. Vers une nouvelle définition de la personnalité juridique internationale ?, Paris, A. Pedone, 2009.Google Scholar

9- Même en poussant les choses très loin, on voit mal l’intérêt de faire d’une réserve pétrolière un sujet de droit. Au contraire, donner des droits sur ce patrimoine aux générations futures pourrait avoir un sens, pour renforcer l’idée de gestion de bon père de famille. Il reste que les droits des êtres vivants doivent être débattus au cas par cas. On peut donner comme exemple les débats autour du virus de la variole ; personne, à ma connaissance ne s’est jamais ému de l’éradication de la variole. Les seuls débats portent autour de l’opportunité de la destruction des stocks déclarés de virus, voir Denamur, Erick, «Faut-il détruire les stocks de virus de la variole ?», Médecine Sciences, 10-2, 1994, p. 226 227, ici p. 226.CrossRefGoogle Scholar En principe, les stocks devaient être maintenus jusqu’en 2002, mais cette période a été prolongée pour pouvoir rapidement relancer une production de vaccin en cas de menace terroriste : http://apps.who.int/gb/archive/pdf_files/EB109/feb10917.pdf, et http://apps.who.int/gb/ebwha/pdf_files/WHA63/A63_19-fr.pdf.

10- http://www.conseil-etat.fr/cde/node.php?articleid=2097.

11- En France, la chasse est autorisée pour un nombre d’espèces beaucoup plus important que dans les autres pays européens, particulièrement pour les oiseaux migrateurs. Selon les chiffres donnés par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage d’après une enquête réalisée en 1998-1999 (la dernière apparemment) auprès d’un échantillon de chasseurs sur certaines des 91 espèces chassables, le bilan s’élèverait à 30 millions d’animaux tués au fusil, ce qui ne comprend pas les pièges, l’arc, la chasse à courre. Cela ne comprend pas non plus les nombreux animaux qui meurent de leurs blessures sans être retrouvés (environ 20% du chiffre global). Pourtant, le nombre des chasseurs diminue.

12- Cela me semble plus important que la modification du Code civil qui a consisté à distinguer à l’intérieur de la catégorie des biens meubles les animaux des autres objets, un pas symbolique important mais apparemment sans conséquence pratique : Antoine, Suzanne, « La loi no 99-5 du 6 janvier 1999 et la protection animale », Recueil Dalloz, chron. 1999, p. 167168.Google Scholar

13- Les mots sont importants : voir Jean-Luc GUICHET (dir.), Douleur animale, douleur humaine. Données scientifiques, perspectives anthropologiques, questions éthiques, Versailles, éd. Quae, 2010.

14- Cette qualité est aujourd’hui inscrite à l’article 6 ter du traité de Lisbonne : «Lorsqu’ils formulent et mettent en oeuvre la politique communautaire dans les domaines de l’agriculture, de la pêche, des transports, du marché intérieur et de la recherche et développement technologique et de l’espace, la Communauté et les états membres tiennent pleinement compte des exigences du bien-être des animaux en tant qu’êtres sensibles, tout en respectant les dispositions législatives ou administratives et les usages des états membres en matière notamment de rites religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux. »

15- Article L. 214-3 du Code rural, article 521-1 du Code pénal.

16- Article 521-1 du Code pénal.

17- Article 99-1 du Code de procédure pénale : lorsque, au cours d’une procédure judiciaire ou des contrôles mentionnés à l’article 283-5 du Code rural, il a été procédé à la saisie ou au retrait, à quelque titre que ce soit, d’un ou plusieurs animaux vivants, le procureur de la République près le tribunal de grande instance du lieu de l’infraction ou, lorsqu’il est saisi, le juge d’instruction peut placer l’animal dans un lieu de dépôt prévu à cet effet et qu’il désigne, jusqu’à ce qu’il ait été statué sur l’infraction. En cas de saisie aux frontières, il existe des stations vétérinaires dans les postes d’inspection frontaliers, qui n’ont guère les moyens d’accueillir l’infinie diversité des animaux sauvages capturés. À l’aéroport de Roissy, une immense animalerie permet de recueillir les animaux saisis vivants : lions, singes, perroquets, lézards, crocodiles.

18- J 805, Sarreguemines 5 mars 2002, 150 €, remise du chien à la SPA qui se voit accorder 160 € de dommages et intérêts.

19- J 806, Puteaux 4 avril 2002, 550 € et 600 € de dommages et intérêts à la SPA.

20- D 1230, Cherbourg 9 décembre 2003, 90 € et 1 € de dommages et intérêts à la SPA, mais pour la même infraction, 500 € d’amende et 700 € de dommages-intérêts à la SPA à St-Germain-en-Laye cette fois.

21- J 1505, Nice 5 septembre 2005 : le tribunal a prononcé une peine d’amende de 150 € et a accordé 150 € de dommages et intérêts à la SPA.

22- Cour de cassation, chambre criminelle, 23 janvier 1989 : Gazette du Palais, 1989, II Somm. 287 ; élément moral de l’infraction, intention de faire souffrir ou donner la mort, Cour de cassation, chambre criminelle, 13 janv. 2004 : Gazette du Palais, 2004,Google Scholar J 3198.

23- Dans une affaire, le maître part un week-end, laissant sur le balcon le chien muselé pour qu’il n’aboie pas… devant une écuelle d’eau.

24- Paris, 2 février 1977.

25- Tribunal correctionnel de Nîmes, 1973.

26- 13 mois de prison ferme le 29 janvier 2007 devant le tribunal correctionnel de Metz.

27- J 809, Melun, 24 mai 2002.

28- J 1217, Boulogne-sur-Mer, 13 janvier 2004.

29- D 1245, Angers, 11 mars 2004.

30- J 1797, Bourges, 3 mars 2006.

31- Un point récent sur toutes ces justifications a été fait dans MarguéNaud, Jean-Pierre et Dubos, Olivier, Les animaux et les droits européens. Au-delà de la distinction entre les hommes et les choses, Paris, A. Pedone, 2009.Google Scholar On trouvera dans la Revue semestrielle de Droit Animalier, 1, 2009, un dossier sur l’expérimentation animale et un sur la corrida, no 2, 2009.

32- Règlement CE 1099/2009 du Conseil du 24 septembre 2009 sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort, Journal officiel de l’Union européenne, L 303/1 du 18 novembre 2009 ; voir deux ans avant, les lignes directrices de l’Office international des épizooties (OIE) pour l’abattage.

33- étant précisé que la norme est fondée sur des « preuves scientifiques suffisantes démontrant que les animaux vertébrés sont des êtres sensibles », était-il bien nécessaire de convoquer la science ?

34- Cour de cassation, chambre criminelle, 4 septembre 2007, no pourvoi 06-82785 ; la condamnation est de 2 000 €, inscription au bulletin no 2 du casier judiciaire.

35- Atias, C., « Moyens de dire le droit et ‘façons de parler’ de la Cour de cassation : une distinction nécessaire », Recueil Dalloz, 3, 2008, p. 177.Google Scholar

36- Argument mis en évidence par Olivier Cayla à propos d’un séminaire de casuistique juridique du 10 mars 2009, non publié, CENJ-EHESS : « Pouce ! Analyse juridique du signe manifestant l’intention d’arrêter de jouer à travers l’étude de l’affaire KA et AD» (CEDH, 17 février 2005, affaire K. A. et A. D. contre Belgique).

37- Ringel, Françoise et Putman, Emmanuel, « L’animal aimé par le droit », Revue de la recherche juridique. Droit prospectif, 60-1, 1995, p. 45.Google Scholar

38- Cour de cassation, 1re chambre civile, 16 janvier 1962, D. 1962, 199, Note R. Rodière ; Revue trimestrielle de droit civil, 316, 1962, obsv. A. Tunc ; Jean-Pierre MARGUéNAUD et al., « La protection juridique du lien d’affection envers un animal », Recueil Dalloz, 2004, chron., p. 3009-3014. Toutefois, la reconnaissance de l’affection d’un humain pour un animal est reconnue, par exemple par l’interdiction faite à un bailleur potentiel de refuser de louer un logement en raison de la présence d’un animal domestique auprès du preneur : le législateur répute ainsi non écrite « toute stipulation tendant à interdire la détention d’un animal dans un local d’habitation dans la mesure où elle concerne un animal familier » : voir François PASQUALINI, « L’animal et la famille », Recueil Dalloz, 1997, chron., p. 257-259 ; on notera une curiosité de la qualification de l’animal comme bien meuble. Comme tous ceux-ci, il est donc saisissable lors des procédures d’exécution des décisions de justice. Pour autant, le législateur a toujours prévu l’insaisissabilité de certains biens nécessaires à la vie quotidienne ou économique du débiteur. On ne s’étonnera donc pas de la présence des « animaux destinés à la subsistance du saisi » dans la liste des biens insaisissables – c’est vrai de beaucoup d’objets inanimés. En revanche, figurent aussi dans cette liste les « animaux d’appartement », qui sont pourtant une charge économique. C’est donc au titre de l’affection qu’ils échappent à la saisie. Comment mieux illustrer l’incertitude contemporaine sur la nature juridique de l’animal ?

39- Cour d’appel de Lyon, 20 décembre 2001, no de RG 1999/07446 ; cet arrêt avait été exploité par J.-P. Marguénaud dans une conférence inédite faite à l’INRA.

40- Certains juges considèrent que leur office, strictement entendu, ne leur donne pas compétence pour déterminer « l’intérêt d’un animal de compagnie eu égard à sa résidence ou ses conditions de vie », cour d’appel de Nancy (3e ch. civ.), 30 novembre 2001, no 02-41. Bulletin d’information de la Cour de cassation, no 552 du 15 mars 2002 ; dans une affaire du même type, la Cour de cassation avait censuré un juge ayant utilisé les règles relatives à la garde des enfants, voir Couret, A., note sous Cour de cassation 1re chambre civile, 8 octobre 1980, Recueil Dalloz, 1981, Juris., p. 361.Google Scholar

41- Jean-Pierre MARGUéNAUD, « L’appréhension par le droit positif des relations complexes entre l’homme et l’animal », in Nouët, J.-C. et Chapoutier, G., Humanité, animalité, quelles frontières ?, Paris, Connaissances et savoirs, 2006, p. 93.Google Scholar

42- Sur la réciprocité de l’affection, voir Dominique LESTEL, « Portrait de l’animal comme sujet », Revue de synthèse, 1, 1999, p. 139-164, ici p. 151. L’auteur rappelle à cette occasion les apprentissages de communication très fins que développent les enfants adoptés par des animaux sauvages pour pouvoir vivre avec eux, de même que les chercheurs qui se font adopter par une meute de loups ou les autistes qui disent « adopter le point de vue d’une vache ».

43- Conférence de J.-P.Marguénaud, op. cit. En revanche, la cour d’appel de Bordeaux, 27 janvier 2009, se déclare incompétente sur ce point car aucun texte ne prévoit de statuer sur la garde d’un animal, voir Marchadier, Fabien, « La chienne Sidonie en quête de son juge », Revue semestrielle de Droit Animalier, 1, 2009, p. 29.Google Scholar

44- Repris à l’article L. 214-1 du Code rural.

45- Voir les explications éclairantes de Burgat, Florence, Liberté et inquiétude de la vie animale, Paris, éd. Kimé, 2005,Google Scholar particulièrement dans la quatrième partie de son livre.

46- Jakob VON UEXKÜLL, Mondes animaux et monde humain, Paris, Denoël, 1984, p. 19 et 23-24 ; Giorgio AGAMBEN, L’ouvert. De l’homme et de l’animal, Paris, Payot & Rivages, 2002. Noter que l’Umwelt (monde extérieur) est complété par l’Innenweilt (monde intérieur) et le Merkwelt (monde tel que formé de l’ensemble des stimuli). Voir d’autre part le travail philologique intéressant de Wolf FEUERHAHN, «Du milieu à l’Umwelt. Enjeux d’un changement terminologique », Revue philosophique de la France et de l’étranger, 4, 2009, p. 419-438.

47- On peut citer un bel exemple de ce courant avec le livre de Despret, Vinciane et Porcher, Jocelyne, Être bête, Arles, Actes Sud, 2007;Google Scholar plus récemment, V. DESPRET a écrit un livre étonnant : Penser comme un rat, Versailles, éd. Quae, 2009. On doit noter aussi que même l’éthologie qui, pourtant, peut nous aider à comprendre le monde mental de l’animal, est encore souvent un obstacle : « À cet égard, la figure de l’animal comme sujet, point aveugle de l’éthologie contemporaine, constitue l’amorce d’un renouvellement possible de nos représentations de l’animal », voir Dominique LESTEL, « Portrait de l’animal comme sujet », Revue de synthèse, 1, 1999, p. 139-164, ici p. 139.

48- Vincent, Catherine, « Aurélien Chanee Brulé, le sauveur en Asie des gibbons sauvages », Le Monde, 31 oct.-1er nov. 2010.Google Scholar

49- Journal officiel des Communautés européennes, no L 221/23 du 8 août 1998. Sur la question du bien-être, voir Burgat, Florence et Dantzer, Robert (dir.), Les animaux d’élevage ont-ils droit au bien-être ?, Paris, éd. INRA-Quae, 2001;Google Scholar voir particulièrement l’article de Florence BURGAT sur « Les revendications des associations de protection des animaux de ferme » qui fait un historique de la législation, p. 65. Voir dans le même ouvrage et du même auteur un article essentiel pour apprendre à déconstruire le concept de bien-être animal, p. 106. L’idée de « premier stade » caractéristique du droit européen, en pleine élaboration, oblige à s’interroger sur l’efficacité économique de la progressivité de l’évolution du droit en prenant l’exemple des cages des poules pondeuses. Dans les années 1980, l’enfermement des poules est maximal. C’est alors que, en 1988, une directive impose une première surface minimale de 450 cm2 par poule ; puis en 1999, il s’agira de 550 cm2 et en 2012, cette surface devra être portée à 750 cm2. Or, on peut vraiment se demander si une approche plus raisonnable des besoins des poules n’aurait pas pu être décidée dès 1988, en laissant aux étatsmembres une quinzaine d’années pour assurer progressivement la transformation des élevages. De plus, est-il « raisonnable » d’avoir des cages métalliques plutôt que des poulaillers ouverts sur l’extérieur ? A-t-on réfléchi à la distinction entre raison humaine et rationalité zootechnique ? Il est question aujourd’hui de sensibilité des poissons, sujet examiné par le Conseil de l’Europe, l’OIE préparant quant à elle des lignes directrices en matière de bien-être pour les poissons d’élevage, longtemps exclus de la sensibilité.

50- Martine LEGUILLE BALLOU, « évolution de la réglementation de protection des animaux dans les élevages en Europe », thèse, Nantes, 1999 ; Lucille BOISSEAU-SOWINSKI, «La désappropriation de l’animal », thèse, Limoges, 2008, http://www.unilim.fr/scd/theses/ accesdoc.html.

51- évidemment, parler de liberté de mouvement évite de renvoyer à des formes plus nobles de liberté.

52- « Il faut produire parce que les uns ont des aliments à vendre, les autres ont des abattoirs à faire tourner […] nous, on n’a pas notre mot à dire […] ils appellent ça un minerai, ils appellent plus ça des cochons » : Porcher, Jocelyne, « Le travail dans l’élevage industriel des porcs, souffrance des animaux, souffrance des hommes », in Burgat, F. et Dantzer, R. (dir.), Les animaux d’élevage ont-ils droit au bien-être ?, op. cit., p. 2564, ici p. 58.Google Scholar

53- Sur cette notion si ambivalente de bien-être, voir les travaux de Florence Burgat, Robert Dantzer et Jocelyne Porcher précités et d’un point de vue juridique, une analyse synthétique de Desmoulin, Sonia, L’animal entre science et droit, Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille, 2006, no 742 sq. Google Scholar

54- Directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses, Journal officiel des Communautés européennes, no L 203 du 03 août 1999, p. 53, cdt. 7.

55- Illustrée par Cloaca, la machine à merde de Wim Delvoye : http://www.wimdelvoye.be.

56- Comité national pour la promotion de l’oeuf ; site à peu près vide où les poules ne sont évoquées que par un dessin de leur utérus : http://www.oeufs-asso.com/.

57- http://www.j-sainsbury.com/cr/index.asp?PageID=74&subsection=&Year= 2009NewsID=1087.

58- Journal officiel de l’Union européenne, no L 10 du 15 janvier 2009, p. 7.

59- Les éleveurs en sont souvent conscients. Il faut dire que, pour ceux qui ont un certain âge, ils savent que le nombre moyen de porcelets sevrés par truie et par an est passé de 16,7 en 1971 à 24,6 en 1999. Il a fallu « ajouter » des mamelles aux truies et lutter contre les temps improductifs, donc réduire la durée de l’allaitement. L’intervalle entre le sevrage des porcelets et la saillie est passé de 20 jours en 1971 à 10 jours en 1999 : J. PORCHER, « Le travail dans l’élevage industriel… », art. cit., p. 30.

60- F. Burgat, Liberté et inquiétude de la vie animale, op. cit., chap. 3.

61- Le concept de créature qui renvoie au divin serait inopérant en France, mais il est assez normal en Suisse dont la Constitution comporte un préambule qui commence ainsi : « Au nom de Dieu Tout-Puissant ! Le peuple et les cantons suisses, conscients de leur responsabilité envers la Création. »

62- Sans pour autant partager des désolations assez excessives, consulter : « Swiss ‘dignity’ law is threat to plant biology », Nature, 452, 2008, p. 919.

63- La notion est travaillée par la Commission fédérale d’éthique pour le génie géné- tique dans le domaine non humain (CENH) instituée en 1998.

64- Hermitte, Marie-AngèleLe concept de diversité biologique et la création d’un statut de la nature », in Edelman, B.etHermitte, M. -A. (dir.) L’homme, la nature et le droit, Paris, Christian Bourgois, 1988, p. 238286 ; Google Scholar Latour, Bruno, Politiques de la nature. Comment faire entrer les sciences en démocratie, Paris, La Découverte, 1999.Google Scholar

65- http://www.natura2000.fr/spip.php?article36. Cette idée de partage du territoire sera ici à peine effleurée et j’éviterai les problèmes spécifiques liés aux grands prédateurs, car ils impliquent une étude particulière au sein de l’étude générale. Dubois, Jérôme et Maljean-Dubois, Sandrine (dir.), Natura 2000. De l’injonction européenne aux négociations locales, Paris, La Documentation française, 2005.Google Scholar

66- En 2010, 45 états ont signé et ratifié la convention de Berne : http://conventions. coe.int/Treaty/fr/Treaties/Word/104.doc. Directive 79/409/CEE du Conseil, du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages, Journal officiel des Communautés européennes, no L 103 du 25 avril 1979, p. 1 ; Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, Journal officiel des Communautés européennes, no L 206 du 22 juillet 1992, p. 7 ; 168 états sont signataires de la convention sur la diversité biologique.

67- La formulation de la directive Habitats est aussi éclairante : « La conservation des espèces d’oiseaux vivant naturellement à l’état sauvage sur le territoire européen des états membres est nécessaire à la réalisation, dans le fonctionnement du marché commun, des objectifs de la Communauté dans les domaines de l’amélioration des conditions de vie, d’un développement harmonieux des activités économiques dans l’ensemble de la Communauté et d’une expansion continue et équilibrée. »

68- Ce sont autant de compromis permanents. C’est la directive Habitats qui a ajouté l’aspect culturel et régional dans l’article 2, alinéa 3 : « Les mesures prises en vertu de la présente directive tiennent compte des exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que des particularités régionales et locales », ce qui est conforme à la reconnaissance de la diversité des rapports à la nature que suggère Philippe DESCOLA, A qui appartient la nature ? : http://www.laviedesidees.fr/A-qui-appartient-la-nature.html, lorsqu’il propose de construire des types divers de protection de la nature en fonction des rapports spécifiques à la nature et aux espèces que chaque région du monde a développés et, faudrait-il ajouter est en train ou continue de les développer. En effet, certaines cultures anciennement animistes peuvent se matérialiser tandis que les cultures mécanistes de l’Occident sont peut-être en train de re-personnifier les éléments de la nature, c’est le thème de cet article.

69- Ord. du 28 octobre 2009, no 0902029. Dubos, Olivier, « De l’intelligence comparée du crapaud et du conseiller de TA», Revue semestrielle de Droit Animalier, 2, 2009, p. 11.Google Scholar Sur le fondement de l’article R. 111-15 du Code de l’urbanisme qui indique que le permis doit respecter les « préoccupations d’environnement » et n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l’environnement. Or l’article L. 411-1 du Code de l’environnement interdit « la destruction ou l’enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d’animaux de ces espèces ou, qu’ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat » et en vertu de l’annexe IV de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, le crapaud accoucheur (Alytes obstetricans) figure parmi les espèces animales présentant un intérêt communautaire et nécessitant une protection stricte.

70- Cour administrative d’appel de Douai, no 05DA01507, 30 novembre 2006.

71- Cour d’appel de Pau, 10 septembre 2009, no 2009/622, Revue semestrielle de Droit Animalier, 2, 2009, p. 112.Google Scholar

72- Cour de justice des Communautés européennes, 28 février 1991, aff. C-57/89, Commission contre République Fédérale d’Allemagne.

73- Cour de justice des Communautés européennes, 7 décembre 2000, Commission contre République française, aff. C-374/98.

74- Au sens de l’article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive, pt. 34 et 36.

75- Au sens de l’article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive, pt. 38.

76- Cour de justice des Communautés européennes, 28 février 1991, aff. C-57/89, Commission contre RFA.

77- Ce point avait été déjà jugé dans deux affaires jugées le 8 juillet 1987, ayant opposé la Commission à la Belgique et à l’Italie (aff. 247/85 et 262/85).

78- En 2002, la Cour condamne l’Irlande pour avoir laissé les éleveurs de mouton pratiquer le surpâturage dans des landes où vivent des populations de lagopèdes fragilisées par la raréfaction des bruyères, broutées par les moutons alors qu’elles sont nécessaires pour nourrir l’oiseau et lui permettre de faire son nid. D’après une étude, la population aurait diminué de plus de 50% dans les vingt dernières années. La solution doit être recherchée dans un plan de gestion passant par le rachat des landes dégradées par l’état et la gestion beaucoup plus restrictive du pâturage par les éleveurs, Cour de justice des Communautés européennes, 13 juin 2002, Commission contre Irlande, aff. C-117/00.

79- Cour de justice des Communautés européennes, 2 août 1993, Commission contre Royaume d’Espagne, aff. C-355/90.

80- Cour administrative d’appel de Bordeaux, 14 décembre 2009, no 08BX01333.

81- Cela souligne l’importance de pouvoir prendre des mesures d’urgence pour arrêter les travaux destructeurs. C’est ainsi que l’Italie avait retiré une autorisation de dragage et entreposage à une entreprise devant agir dans une zone proposée à la protection communautaire mais non encore classée. L’entreprise fit un recours qui lui fut défavorable et le tribunal saisi posa une question préjudicielle à la Cour de justice. Celle-ci reconnut que la protection ne commençait effectivement qu’à la date du classement. Pour autant : « s’agissant des sites susceptibles d’être identifiés comme sites d’importance communautaire, mentionnés sur les listes nationales transmises à la Commission, parmi lesquels peuvent figurer notamment des sites abritant des types d’habitats naturels prioritaires ou des espèces prioritaires, les états membres sont, en vertu de la directive, tenus de prendre des mesures de protection aptes à sauvegarder ledit intérêt écologique ». Autrement dit, c’est à l’état membre de trouver la solution de droit interne apte à protéger cet intérêt, Cour de justice des Communautés européennes, 13 janvier 2005, aff. 117/03, pt. 29 ; voir les propositions d’Isabelle VEILLARD, « Prévenir les nouveaux risques », thèse Paris 1, septembre 2010.

82- Pour n’en citer que deux, Larrère, Catherine et Larrère, Raphaël, Du bon usage de la nature. Pour une philosophie de l’environnement, Paris, Flammarion, [1997] 2009 Google Scholar et François OST, La nature hors-la-loi. L’écologie à l’épreuve du droit, Paris, La Découverte, 1995.

83- On peut lire à cet égard le livre de Pierre Lecomte DU NOÜY, La dignité humaine, Paris, éd. du Champ-de-Mars, 1947. Ce concept est le rempart qu’il choisit pour mener sa reconquête passionnée de l’isolement humain mis en péril par la théorie de l’évolution au profit de ce qu’il appelle le téléfinalisme. On trouvera des proximités avec les mouvements actuels du dessein intelligent.

84- Hermitte, Marie-Angèle, «Le droit est un autre monde », Enquête, anthropologie, histoire, sociologie, 7, 1999, p. 1737.Google Scholar

85- Comme le montre la création de la revue semestrielle de droit animalier en 2009, qui témoigne de la constitution d’un milieu intellectuel autour de la question de l’animal ; cette limitation de la question à l’animal peut être soutenue avec passion : Burgat, Florence, Liberté et inquiétude de la vie animale, Paris, éd. Kimé, 2005, p. 157 sq. Google Scholar

86- Ibid.

87- Voir note 89.

88- Jean-PierreMarguénauD, « La personnalité juridique des animaux », Recueil Dalloz, 1998, chron. 205, p. 205.

89- Ibid.

90- En revanche, cela n’est pas vrai des végétaux protégés, mais à ce jour on ne voit pas de dommages qui puissent leur être liés ; on peut se demander ce qu’il en est des zones protégées au détriment des activités économiques. On ne peut parler à proprement parler de la responsabilité de ces zones pour préjudice économique à ceux qui les habitent. Il existe toutefois, en faveur des agriculteurs, des mécanismes d’aides aux productions agricoles durables ou aux contrats d’entretien de la zone qui peuvent passer pour des mécanismes compensatoires. Ce serait une forme embryonnaire de responsabilité de la zone pour compenser le dommage économique créé par les modes de gestion qui lui sont propres. L’état est alors le tuteur de la zone qu’il a affectée à la protection de la biodiversité. On signalera pour la petite histoire qu’aux états-Unis, un pitbull ayant attaqué une voiture de police dont il détruisit les pare-chocs, fut condamné à de la prison et libéré au bout de quelques semaines pour bonne conduite.

91- Ce sont les préfets qui les accordent et les tirs sont rigoureusement encadrés (période, horaires, personnes et armes autorisées, possibilités exceptionnelles de destruction de nids et d’oeufs). Pour l’année 2009-2010, Journal Officiel, no 0301, 29 décembre 2009, p. 22563.

92- Revue juridique de l’environnement, 2004-2, p. 189,Google Scholar obs. Stéphanie Juan, et Revue de droit rural, 3, 2004, p. 73 Google Scholar note Benoît Grimonprez. On peut mettre cette solution en regard de la responsabilité des sociétés de chasse. Il s’agit alors d’animaux, sauvages mais non protégés, venant de territoires gérés par des fédérations départementales de chasse qui assurent la responsabilité des dommages causés aux agriculteurs voisins lorsqu’il s’agit d’animaux « soumis à plans de chasse ». Dans ce cas, le juge estime, assez curieusement, que l’agriculteur doit supporter un certain « prélèvement » des animaux sauvages sur ses récoltes et n’indemnisera que la partie du dommage qu’il estime excessive (Cour de cassation, 2e chambre civile, 25 juin 1975, no 73-11826). C’est une sorte de « franchise » fixée par décret en deçà de laquelle l’agriculteur n’est pas indemnisé, et qui institue une curieuse liberté de prélèvement du sauvage sur le domestique. À propos de la loi Voynet du 26 juillet 2000, on peut consulter Laurent CARNIS et François FACCHINI, « Une approche économique des dégâts de gibier. Indemnisation, prix et propriété », in Colloque de la Société française d’économie rurale, « Chasse, territoires et développement durable. Outils d’analyse, enjeux et perspectives », mars 2008 : http:// www.sfer.asso.fr/media/files/colloque_chasse_territoires_et_developpement_durable_outils_ d_analyse_enjeux_et_perspectives.

93- Le mot patrimoine utilisé dans le cadre du droit de l’environnement a un sens différent de celui du mot patrimoine utilisé dans les autres branches du droit. En droit commun, la catégorie renvoie soit à une entité abstraite contenant (ou non) des biens matériels appropriés ; on parle aussi de droits patrimoniaux. En droit de l’environnement, la catégorie renvoie au contraire à la valeur patrimoniale, immatérielle, attribuée à des entités non appropriées.

94- Desmoulin, S., L’animal entre science et droit, op. cit., t. II, p. 566.Google Scholar

95- Ibid., t. II, p. 618 sq.

96- Ibid., t. II p. 567.

97- Marie-Angèle Hermitte, « La fondation juridique d’une société des sciences et des techniques par les crises et les risques », in Burton-Jeangros, C.,Grosse, C. et V.|November(dir.), Face au risque, Chêne-Bourg, Georg, 2007 p. 2971.Google Scholar

98- M.-A. Hermitte, « Le droit est un autre monde », art. cit.

99- Impossible d’entrer ici dans les débats sur la fonction anthropologique du droit, souvent perçue comme le maintien de grandes structures intangibles. C’est une interprétation possible qui peut apparaître comme une nouvelle forme de jusnaturalisme. Pour ma part, je l’entends au contraire comme la participation du droit à la construction des évolutions de l’anthropologie.

100- Conférence donnée à l’INRA, sous presse. Ce point a été travaillé par élisabeth de FONTENAY, Le silence des bêtes. La philosophie à l’épreuve de l’animalité, Paris, Fayard, 1998, et plus particulièrement par Philippe BRENOT, « La honte des origines », in B.CYRULNIK (dir.), Si les lions pouvaient parler. Essais sur la condition animale, Paris, Galllimard, 1998, p. 127. Il est intéressant de constater qu’on retrouve mention de cette humiliation dans les arguments avancés pour légaliser les manipulations génétiques sur les êtres humains, de telle sorte que les humains puissent retrouver un niveau équivalent à leurs machines qui les ont depuis longtemps dépassées, voir Jean-Marie BESNIER, Demain les posthumains. Le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Paris, Hachette Littératures, 2009.

101- Comme le montre la réaction immédiate de Lecourt, Dominique au livre de BOURG, Dominique et Papaux, Alain (dir.), Vers une société sobre et désirable, Paris, PUF, 2010,Google Scholar dans Le Monde Magazine, 27 mars 2010 : « Que nous propose mon bon Dominique Bourg, philosophe qui officie pour la Fondation Hulot ? Une société sobre, frugale. C’est ça que nous voulons pour nos enfants ? Très peu pour moi. J’ai appris auprès de Nietzsche le culte de l’ivresse ! […] Si l’humanité ne s’était pas toujours dit qu’elle était capable de maîtriser un avenir qu’elle construirait elle-même en fonction d’un type d’homme qu’elle aimerait faire devenir, nous ne serions pas là. » Sans s’attarder sur le mépris – qui participe peut-être de l’ivresse –, on dira simplement que l’on peut souhaiter éduquer un type d’homme qui connaisse l’ivresse de la culture et plus de mesure dans la consommation de produits périssables !

102- Philippe Descamps déploie une philosophie du droit d’utiliser les gamètes et les machines pour libérer la procréation des contraintes de la nature, non seulement en raison des pathologies, mais des limites liées à la reproduction sexuée : Philippe DESCAMPS, Un crime contre l’espèce humaine ? Enfants clonés, enfants damnés, Paris, Les Empêcheurs de penser en rond, 2004 ; Id., L’utérus, la technique et l’amour. L’enfant de l’ectogenèse, Paris, PUF, 2008. C’est un préalable pour la manipulation de l’espèce.

103- Klaus-Gerd Giesen, « Politiques de l’espèce et bioéthique. De la crise du sujet à sa normalisation », in Benyekhlef, K. et Trudel, P. (dir.), état de droit et virtualité, Paris, Thémis, 2009, p. 243263;Google Scholar Id., « Transhumanisme et génétique humaine », L’observatoire de la génétique, 16, 2004 (site indisponible à ce jour).

104- Il reste néanmoins un nombre non négligeable d’auteurs pour lesquels rien n’est à changer car les éléments de la nature ne figurent pas dans leurs travaux de droit des biens. Ils sont renvoyés au droit de l’environnement et à ses qualifications patrimoniales, comme si les deux branches du droit étaient étanches.

105- Del Rey-Bouchentouf, Marie-Josée, « Les biens naturels, un nouveau droit objectif : le droit des biens spéciaux », Recueil Dalloz, 23, 2004, p. 1615.Google Scholar

106- Grégoire LOISEAU, « Pour un droit des choses », Recueil Dalloz, 2006, chron., p. 3015 ; Rémy LIBCHABER, « La recodification du droit des biens », in J.-L. HALPéRIN et al., Le Code civil 1804-2004, Livre du bicentenaire, Paris, Dalloz-Litec, 2004, p. 297- 341, et Id., « Perspectives sur la situation juridique de l’animal », Revue trimestrielle de droit civil, 2001, p. 239-243 ; S.DESMOULIN, L’animal entre science et droit, op. cit., t. II, p. 662 sq.

107- Suzanne Antoine, Rapport sur le régime juridique de l’animal : http://lesrapports. ladocumentationfrancaise.fr/BRP/054000297/0000.pdf, et Association Henri Capitant : http://www.henricapitant.org/sites/default/files/Avant-projet_de_reforme_du_droit_des_ biens_19_11_08.pdf. Sur cette proposition, voir Suzanne Antoine, l’analyse de, «Le projet de réforme du droit des biens. Vers un nouveau régime juridique de l’animal ?», Revue semestrielle de Droit Animalier, 1, 2009, p. 11-20, ici p. 15.Google Scholar

108- Bien d’autres auteurs avaient fait des propositions intéressantes mais moins praticables, car elles essayaient de se situer en dehors du choix des personnes-choses, ce qui est beaucoup plus déstabilisant pour la structure du système juridique. On peut citer Farjat, Gérard, « Entre les personnes et les choses, les centres d’intérêts (prolégomènes pour une recherche) », Revue trimestrielle de droit civil, 2, 2002, p. 221245;Google Scholar on parle parfois en doctrine de centre d’intérêts à propos de la famille, qui n’est pas un sujet de droit, mais dont le juge peut prendre en compte l’intérêt… ; Sylvie PASQUET, « étude comparée des statuts juridiques de l’embryon et de l’animal », Mémoire DEA, Paris1/EHESS, 2001, qui parle de « corps sensible » comme tierce catégorie, tentative plus littéraire que juridique, valable pour les animaux, ne dit rien des autres éléments de la nature ; une zone de diversité biologique qui doit pouvoir plaider pour son maintien en l’état n’est pas un « corps sensible » ! On peut encore signaler l’idée de « personnalité modeste » de Piatti, Marie-Christine, « Droit, éthique et condition animale. Réflexion sur la nature des choses », Les Petites Affiches, 60, 19 mai 1995, p. 49.Google Scholar

109- C’est l’affaire de la marée noire du Zoe Colocotroni qui a attiré l’attention sur cette difficulté, voir le débat entre Martine RéMOND-Gouilloud et Marie-Angèle Hermitte, in Edelman, B. et Hermitte, M.-A. (dir.), L’homme, la nature et le droit, op. cit., p. 207 à 284.Google Scholar

110- Geneviève VINEY, « Les principaux aspects de la responsabilité civile des entreprises pour atteinte à l’environnement en droit français », La Semaine Juridique, 1966, p. 3900 ; Gilles MARTIN, « Réflexion sur la définition du dommage à l’environnement : le dommage écologique pur », in J.-Y. CHéRot et al. (dir.), Droit et environnement. Propos pluridisciplinaires sur un droit en construction, Aix-en-Provence, Presses universitaires d’Aix-Marseille, 1995, p. 115.

111- Cour de justice des Communautés européennes, 13 octobre 1987, Commission contre Pays-Bas, non-respect conservation oiseaux sauvages, aff. 236/85, pt. 5.

112- Les associations agréées peuvent agir tant contre des décisions administratives (art. 142-1 du Code de l’environnement) qu’exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un « préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre » (art. 142-2 du Code de l’environnement) et il en va de même pour les collectivités territoriales en vertu de l’art. 142-3 du Code de l’environnement.

113- Il est ennuyeux d’introduire de nouveaux mots, mais l’idée proposée ici n’est pas stabilisée. Elle renvoie aux mécanismes qui facilitent la tenue de procès. Jean Carbonnier avait proposé l’idée de justiciabilité avec un sens légèrement différent et Laurent CADIET, celui de processualisation : « Les jeux du contrat et du procès : esquisse », in Philosophie du droit et droit économique : quel dialogue ? Mélanges en l’honneur de Gérard Farjat, Paris, éd. Frison-Roche, 1999, p. 2641.Google Scholar

114- Martin, Gilles (dir.), Le dommage écologique en droit interne, communautaire et comparé, Paris, Economica, 1992.Google Scholar De rares décisions avaient évoqué le « préjudice subi par la flore et les invertébrés dumilieu aquatique » et le « préjudice subi par le milieu aquatique », voir par exemple, Bordeaux 13 janvier 2006, cité par Neyret, Laurent, in Cour de cassation, La réparation des atteintes à l’environnement, 2007 :Google Scholar http://www.courdecassation.fr/ colloques_activites_formation_4/2007_2254/assurances_responsabilites_9490.html.

115- Boutonnet, Mathild, « Vers la réparation intégrale des atteintes à l’environnement», Environnement, 7, 2010, p. 13.Google Scholar

116- Neyret, Laurent, Atteintes au vivant et responsabilité civile, Paris, LGDJ, 2006.Google Scholar

117- Ce à quoi la Cour répond : « S’il est vrai […] que le droit d’agir pour défendre cet intérêt collectif peut légitimement être revendiqué par l’état, en sa qualité de défenseur des intérêts de la Nation et au travers de l’action du parquet, il peut l’être aussi par les collectivités territoriales dès lors qu’il lui [leur] est personnel. »

118- Boutonnet, Mathilde, « Les catégories de préjudices à l’épreuve de l’arrêt Erika », Revue Lamy Droit civil, 73, 2010, p. 1824.Google Scholar

119- On notera que seuls les avocats des parties civiles ont fait l’effort de proposer des évaluations raisonnées, et c’est dans ces parties de l’arrêt que l’on « voit » les éléments de la nature en dehors des intérêts humains.

120- Pacha Mama, traditionnellement, est un être vivant à l’origine de tout, que ce soient les êtres vivants, les minéraux, mais aussi tout ce que les hommes en tirent par leurs techniques, et qui donnent les tissus ou les bijoux. Elle tient ensemble la nature et la technique.

121- Pour une présentation synthétique du principe, voir Dintilhac, Jean-Pierre, Rapport annuel de la Cour de cassation, 2003 Google Scholar, http://www.courdecassation.fr/publications_ cour_26/rapport_annuel_36/rapport_2003_37/.

122- Affaire Szwabowicz c. Suède 30 juin 1959.